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Les alertes

par | 9 juillet 2021 | Newsletter

N°1 – Europe : les étapes graduelles des attaques juridiques et médiatiques contre l’industrie de défense

Depuis la guerre au Yémen, la campagne contre l’industrie de défense en France et en Europe a franchi plusieurs étapes qui sont chronologiquement les suivantes :

La lutte contre les exportations à destination des pays en guerre ouverte (civile ou extérieure) ;

La lutte contre les exportations de défense à destination de régimes dit arbitraire, dictatorial, etc ;

L’exclusion de toute exportation de défense hors monde occidental (UE, OTAN et pays assimilés), lancé par la SPD (Sigmar Gabriel étant Vice-Chancelier et ministre de l’Economie), puis reprise par le Parlement européen (rapport Neumann, 2020) ;

L’attaque ad hominem des responsables de l’exportation dans les industriels de défense

L’exclusion de tout financement pour l’exportation de défense ;

La lutte contre le service après-vente, considéré comme aussi importante que la vente elle-même ;

Le projet d’exclure de tout financement l’activité de production de défense en Europe par le jeu des labels (ESG et ISR) et des bourses mondiales (à commencer par celle de Francfort).

L’étape prochaine sera une campagne structurée auprès des partis politiques afin que ces thèmes soient repris dans leurs plateformes respectives.

Commentaires :

Professionnalisées, coalisées, les ONG multiplient les attaques contre les banques (risque d’image mis en valeur), les parlements (pour, à défaut, de légiférer contre la production & exportation, obtenir l’information au nom de la transparence et faire campagne ensuite dessus, ce qui se pratique depuis des années en Allemagne) et les fonds d’investissements (pour imposer les labels ESG et ISR).

De l’avis des financiers, sans contrepoids de la part du gouvernement, du Parlement, des groupements et des industriels, la digue au sein des institutions financières et bancaires ne résistera pas longtemps. Une affaire comme celle des Rafale en Inde fragilise considérablement la position de ceux qui souhaitent continuer à financer l’exportation d’armement, même dans des pays très ciblés (Egypte, notamment).

Notre Groupe en profite ici pour dire son soutien total à l’exportation d’armement face aux attaques structurées dont l’industrie de défense en Europe est la victime ; les procédures de contrôle sont extrêmement rigoureuses, les exportations sont encadrées par des accords d’Etat à Etat et servent à la défense d’Etats souverains, dont c’est le devoir que d’assurer à leurs citoyens et économies la paix dont ils ont besoin pour vivre libres et prospères.

N°2 – Allemagne : le rapport 2020 sur l’exportation de défense

Validé par le Conseil Fédéral de Sécurité, le rapport 2020 sur l’exportation de Défense confirme plusieurs tendances de fond :

La politique restrictive (dite de retenue et de responsabilité) porte ses fruits puisque les autorisations à exportation (l’équivalent des AEMG françaises) ont diminué entre 2019 (8 milliards) et 2020 (5,8 milliards €) ; les autorisations à exportation (Genehmigungen für Lieferungen von Rüstungsgütern) ne sont pas, on le rappelle ici à l’attention des journalistes qui confondent souvent les deux, l’exportation (tatsächlich erfolgten Ausfuhren) au sens français des livraisons ; le rapport fait bien la distinction entre des autorisations à exporter d’un montant total de 5,8 milliards € et des exportations réelles (livraisons au client) d’un montant total de 1,377 milliard € ;

L’hypocrisie allemande se poursuit puisque seules sont comptabilisées dans les exportations (au sens de livraison et non pas d’autorisation) les matériels de guerre (Kriegswaffen) et non les équipements de défense, ce qui conduit donc à minorer le montant réel des exportations de défense (matériels de guerre et équipements de défense non létaux) ;

Le domaine naval demeure l’un des socles de l’exportation de défense allemande : 1,5 milliard € sur les 5,8 milliards € ; il s’agit principalement d’exportations hors d’Europe : pour l’Egypte (le dernier sous-marin U-209/1400 sur les 4 exportés, le programme de construction de 4 corvettes Meko et 10 patrouilleurs destinés à l’Arabie mais re-routés sur Le Caire), pour Israël (sous-marin Dolphin et frégate légère Sa’ar 6) ;

Le domaine terrestre avec 1,3 milliard € confirme aussi sa résistance avec la Hongrie (chars de combat et véhicules blindés), le Qatar (idem) et l’Australie (véhicules blindés)…

N°3 – Egypte : inauguration de la base navale du 3 juillet près de la frontière avec la Libye

La Marine égyptienne renforce son emprise avec les zones de conflits potentiels par la construction de trois nouvelles bases (avec de véritables infrastructures technico-opérationnelles), dont deux sont achevées et la dernière, inaugurée le 3 juillet au-lendemain d’exercices amphibies importants (Qader 2021) :

A Ras Banas, en Mer rouge, proche de l’aéroport de Berenice ; inaugurée en janvier 2020, elle permettra de renforcer la base principale de Safaga, plus au Nord, en faisant son pendant au Sud ;

A East Port Saïd, pour verrouiller le Nord de l’entrée du Canal de Suez, opérationnelle ;

El Negeila (base de Gargoub), à l’Ouest de Marsa/Matrouh pour la flotte du Nord destinée à protéger la Méditerranée et inaugurée le 3 juillet avec de nombreuses personnalités (EAU, Libye, Arabie notamment).

Elles viennent compléter les bases navales d’Alexandrie (Ras El Tin – Abu Qir), de Port Said, de Safaga et de Matrouh, les quais (militaires) à Damiette, Hurghada et Sharm El Sheikh.

L’Egypte se donne ainsi les moyens d’une politique maritime ambitieuse en Méditerranée et en mer Rouge tout en diversifiant ses fournisseurs de plateformes (États-Unis, France, Allemagne, Italie).

N°4 – Turquie : accord technique militaire avec le Qatar

Signé le 2 mars dernier à Doha par les généraux Al-Ghanim et Guler, l’accord technique de coopération militaire entre le Qatar et la Turquie, a été déposé en juin au Parlement turc et est actuellement discuté, ce qui permet d’en connaître les clauses les plus importantes :

Il s’agit de l’extension de l’accord de base signé le 23 mai 2017 ; il est la contrepartie de la présence turque au Qatar puisqu’il a pour objectif d’autoriser le stationnement de matériel et de personnel qataris sur le sol turc (articles I & II et 2 : objectifs et périmètre) ; dans l’article III, la Turquie est désignée comme Host Nation (HN) et le Qatar comme la Sending Nation (SN) ;

L’article IV règle les procédures de stationnement : le plafond est fixé à 36 aéronefs et 250 militaires qataris ; l’objectif de ce stationnement est d’améliorer la capacité opérationnelle des forces armées qataris ;

L’article XXI informe de la durée de l’accord, une fois ratifié (5 ans).

Si l’installation de la Turquie au Qatar avait troublé la région, la réciproque sera également vraie, notamment en Grèce où l’on s’inquiète déjà de la présence d’aéronefs américains et français en Turquie pour compenser provisoirement la faiblesse supposée de l’armée de l’air turque après la décision américaine de lui fermer l’accès au F-35.

Par ailleurs, la relation militaire se double d’une relation économique importante avec de très nombreux achats qataris de terrains, d’immeubles et de sociétés.

N°5 – Turquie : le danger d’une relation armement avec l’Ukraine

C’est un vaste échange croisé de coopérations militaires et de coopérations industrielles qui se noue depuis des mois entre Ankara et Kiev dans une sorte de ballets de services rendus réciproquement.

L’objectif principal des deux pays est une alliance qui les sort chacun de leur isolement : l’Ukraine, qui se radicalise face à la Russie se cherche des alliés fermes, tandis qu’Ankara, mis à l’index un peu partout (sauf à Bruxelles où l’UE et l’OTAN continuent de la courtiser par crainte pour l’une de vagues migratoires, pour l’autre, d’une alliance trop marquée avec la Russie).

La coopération dans l’armement est multiple :

dans le domaine anti-char où le missile ukrainien Skif équipe les tourelles Serdar des véhicules blindés turcs Varta vendus au Qatar,

dans le domaine naval où la Turquie a vendu 4 corvettes Milgem-A à la marine ukrainienne,

dans le domaine des drones où Ankara a vendu à Kiev 2 systèmes complets du drone TB2 (avec l’armement en roquettes guidées et non guidées associé),

Un cas à la fois récent et emblématique de cette relation florissante a été constaté dans le domaine des moteurs d’hélicoptères. Depuis l’acquisition du S-400, la Turquie ne peut plus compter sur l’importation de matériels américains, dont les moteurs de ses hélicoptères T129 exportés au Pakistan (30 machines) et aux Philippines (24) : or sans moteurs, les projets export étaient condamnées comme l’était le programme T-129 dans son ensemble. L’alliance avec l’Ukraine lui donne la solution technique : Motor Sich, producteur ukrainien de moteurs d’hélicoptères, lui fournira les moteurs nécessaires pour les hélicoptères de combat pakistanais et peut-être philippins si ceux-ci poursuivent leur projet d’acquisition.

Multiple, florissante, cette coopération est aussi opaque et donc dangereuse, car elle ne vise pas seulement le réarmement ukrainien (qui pourrait se comprendre), mais aussi celui des alliés du Turc (Qatar, Azerbaïdjan et Pakistan, notamment et Libye demain ?) dans des domaines très proliférants (missiles anti-chars et drones de combat) et très utilisés pendant des guerres asymétriques.