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Défense. Les alertes

par | 22 septembre 2020 | Newsletter

France : la très stratégique fonderie Aubert & Duval à vendre

Le projet de cession de la fonderie Aubert & Duval, filiale d’Eramet et spécialiste des alliages de haut très niveau, remet de nouveau le projecteur sur un sujet crucial : la vente de sociétés stratégiques pour la défense. Après les cessions de Souriau, Nexeya, HGH, Latécoère, Photonis, va-t-on de nouveau assister au passage sous pavillon étranger d’une société française à la technologie stratégique pour nos forces armées et l’ensemble de l’industrie de défense ?

Si la DGA fait de son mieux, le problème majeur est le manque de fonds français privés capables d’investir dans la Défense comme aux Etats-Unis (Carlyle, KKR, etc). Au-delà des actions du ministère des armées et des dispositifs juridiques de Bercy, c’est bien tout un éco-système économique et fiscal qui fait défaut à la France pour préserver ses pépites technologiques et industrielles. La priorité est donc le restaurer par des mesures macro et micro-économiques et fiscales encourageant l’investissement industriel pérenne en France.

Allemagne : gel confirmé de la relation avec l’Arabie

Le dossier de vente de ravitailleurs Airbus (dit MRTT) à l’Arabie saoudite est gelé car le conseil de sécurité allemand estime que le consensus n’est pas réuni sur ce projet. Il attendra donc les élections du 19 septembre 2021. Ce gel pénalise surtout Airbus Espagne (usine de production de Getaffe), au point que Madrid demande à Berlin la conclusion d’un accord sur l’exportation bilatérale similaire à celui négocié durement avec la France, et qui, est dans tous les cas, un pis-aller.

Redisons de nouveau à ce propos que l’Allemagne n’est pas un partenaire fiable dans l’armement, en raison de sa politique sur l’exportation qui pénalise plus ses partenaires qu’elle pour qui la vente d’armes ne représente en moyenne annuelle qu’entre 0,06% (2019) et 0,21% (2016&2017) de ses exportations totales…

Roumanie : bilan chiffré des contrats américains

La Roumanie poursuit la réalisation des programmes de défense sol-air Patriot et de lance-roquettes Himars avec les Etats-Unis, comme en témoigne le contrat de Lockheed-Martin pour le programme HIMARS – 183 182 541 $ – en date du 31 août.

Les projets Himars & Patriot cachent cependant une multitude d’autres contrats américains relatifs à la base d’intercepteurs américains SM-3 située à Deveselu et au F-16 (équipements, armements, moteurs notamment).

Rappelons que les montants des contrat Patriot (7 batteries pour 3,9 milliards $) et Himars (1,25 milliard $ pour 54 lanceurs).

Rappelons également que le projet de corvettes multi-missions (4 pour 1,2 milliard €) que Naval Group a remporté, est toujours, quant à lui, bloqué par des recours intempestifs du chantier néerlandais Damen. Pendant que ce projet naval est bloqué par la concurrence, le ministère de la Défense paie ses contrats américains.

Hongrie : pacte blindé avec l’Allemagne

Après un premier contrat signé le 19 décembre 2018 (pour 44 Leopard 2A7 neufs, 12 Leopard 2A4 d’occasion et 24 obusiers PzH2000), l’industrie allemande a signé cet été un deuxième contrat pour le véhicule de combat d’infanterie Lynx : 218 véhicules pour 2 milliards avec 46 produits en Allemagne et le reste en Hongrie à Zalaegerszeg (création d’une usine pour un montant de 60 milliards de forint, soit 168 millions €).

EAU et F-35 : état du dossier

Initiative visiblement personnelle du Premier ministre israélien et totalement contraire aux déclarations publiques officielles précédentes, le feu vert israélien à la vente de F-35 aux EAU vient entériner trois faits :

Un renforcement prévu de l’aide décennale militaire américaine, car si les relations entre les EAU et Israël amorcent une normalisation, elles n’entament en rien le principe sacré de la supériorité militaire israélienne ;

Le projet d’acquisition, en discussion irrégulière depuis des années, est à l’étude depuis quelque temps, avec, certainement, un avion détaré par rapport aux F-35 vendus à Israël ;

L’armée de l’air israélienne qui vient de recevoir son deuxième escadron de F-35, va débuter l’intégration, avec l’aide de l’industrie, d’équipements spéciaux. En 2009, Israël a imposé trois conditions préalablement à l’acquisition du F-35I :

le prix unitaire de l’avion (plafond fixé à 100 millions de dollars) ;

l’accès aux technologies et aux codes-source ;

la capacité autonome d’intégrer dans l’avion des systèmes spécifiques israéliens (armements & senseurs israéliens, intégration du F-35I dans le système « C4I » national et installation d’un système d’autoprotection israélien sur le F-35I).

Même avec ces trois assurances, Israël pourrait être menacée : moins par le futur F-35 émirien que par le déblocage des freins qui interdisaient la vente de systèmes sensibles comme les drones aux pays arabes, même à ceux qui avaient normalisé leurs relations avec l’Etat hébreu (Jordanie, Egypte). C’est la prolifération de tels systèmes dans les pays arabes qui rend une partie de l’appareil militaire israélien (très) mal à l’aise avec cette décision personnelle de M. Nentanyahu.

Lectures

France : plan de relance défense. Le rapport GriveauxThiériot sur la nécessité d’un plan de relance pour la Défense a été présentée le 21 juillet. Il rappelle la nécessité de bon sens de compenser les conséquences désastreuses de la crise aéronautique commerciale et du fort ralentissement des relations commerciales avec les pays export par une relance de la dépense de défense. Les sociétés duales compensant par la défense la chute du secteur civil et les sociétés purement défense, celle du secteur international. Ce rapport a le mérite de rappeler ce raisonnement économique et industriel de bon sens et de mentionner également l’ensemble des secteurs industriels, au-delà du seul Airbus, largement servi dans le plan de relance du gouvernement.

Allemagne et politique de défense des verts. Début septembre, sous la plume de Gäelle Winter, la Fondation pour le Recherche Stratégique a diffusé un rapport sur la politique de défense des Verts, rappelant non seulement l’héritage pacifiste du passé, mais aussi l’évolution actuelle vers des positions plus nuancées par rapport à celles plus radicales de la SPD. Partenaires potentiels de la CDU et de la CSU, les Verts sont, rappelons-le, favorables aux coopérations européennes dans l’armement comme moyen de diluer l’armement national, réticent aux opérations extérieures et opposés aux exportations d’armement hors de l’Union européenne et de l’OTAN. Des positions qui influenceront le futur contrat de coalition dans un sens certainement très défavorable aux intérêts français.

Russie. L’Observatoire de la Chambre de commerce et d’industrie franco-russe a diffusé son rapport estival, toujours aussi riche d’analyses sur la Russie : rappelant que la récession sera moins sévère que prévue, cette note décrit « l’été intranquille du Kremlin », entre révolte en Extrême-Orient, affaire Navalny et contestations en Biélorussie.

Chine. Le CMSI (China Maritime Studies Institute) qui dépend du Naval War College américain a consacré son 6èle numéro de la collection « China Maritime Report » à Djibouti, 1ère base de soutien chinoise hors territoire national et son 7ème au port pakistanais de Gwadar totalement sous contrôle chinois (et qui relie l’Hinterland chinois à l’Océan Indien). Ces rapports analysent le développement du « système de soutien à l’étranger » chinois et comment Pékin cherche à établir une solide présence commerciale, diplomatique et militaire à Djibouti et à Gwadar dans l’objectif de devenir une puissance maritime concurrente des Etats-Unis (la Russie est considérée comme dépassée depuis quelque temps déjà). Ces memos décrivent le concept chinois des « implantations stratégiques en outre-mer » (oversea’s strategic strongpoint), c’est-à-dire les ports étrangers ayant une valeur stratégique et économique particulière, et réunissant les caractéristiques suivantes : un emplacement à proximité des principales voies de communications maritimes ; des investissements majeurs, nécessitant une coordination entre les entreprises publiques et privées pour développer le port et les infrastructures attenantes ; leurs fonctions civiles et militaires, qui les transforment en plates-formes économiques, militaires et diplomatiques.

Chiffres

18 Rafale pour la Grèce dont 12 prélevés sur l’armée de l’air et 6 neufs pour un peu moins de 2 milliards €, formation, senseurs et systèmes d’armes compris.

2,1 milliards € pour la Défense allemande : la Commission du Bundestag a validé 2,1 milliards € pour la modernisation des infrastructures informatiques de la Bundeswehr (1,6 milliard €) et l’armement de ses plateformes navales (285 millions € pour 160 missiles mer-mer suédois destinés aux corvettes K130 ; 213 millions € pour 2290 kits de guidage pour l’Eurofighter). Soit presque trois le plan de relance défense français (833 millions essentiellement pour Airbus).